Le Projet Archéologique Guanacaste (PRAG)
Dates : 2018-2022
Problématique
Le nord-ouest du Costa Rica est considéré par plusieurs auteurs comme l’extrémité méridionale de l’aire culturelle mésoaméricaine, à la différence de la plus grande partie de son territoire qui est considérée comme appartenant à une autre aire culturelle, l’Aire Intermédiaire. Le pays a donc formé une zone d’interactions culturelles à l’époque Préhispanique. Il faut considérer le caractère dynamique d’une telle zone, non pas tant comme une frontière définie par une ligne, mais plutôt comme une zone charnière évolutive au cours des siècles. Le Projet Archéologique Guanacaste (PRAG) se propose d’étudier ces interactions culturelles par le prisme de l’art rupestre ; il se concentre sur le site du Pedregal, le site d’art rupestre le plus étendu du Costa Rica avec 494 roches gravées sur 88 hectares, mais prévoit également l’étude des gisements de la cordillère de Guanacaste, où plus de 60 gisements rupestres ont été recensés dans la base de données Origenes du Musée National. Des campagnes de terrain sont prévues jusqu’en 2021 dans le but de comprendre quels ont été les processus culturels qui ont accompagné la production rupestre au Pedregal et le rôle qu’a joué la cordillère de Guanacaste en tant que charnière dans la zone de d’interactions culturelles.
Le PRAG est un projet international et pluridisciplinaire franco-allemand-costaricien et il implique des institutions publiques et privées. En France, ce sont l’Institut Français d’Amérique Centrale, la commission des fouilles à l’étranger du MAEDI, l’Ambassade de France au Costa Rica, le Centre français d’Etudes Mexicaines et Centraméricaines (CEMCA) et l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives (INRAP) qui soutiennent le projet. En Allemagne, c’est la fondation Deutsche Altamerika Stiftung, le Département des Cultures Anciennes d’Amérique de l’Université de Bonn et le Service d’Echange Académique Allemand (DAAD) qui appuient le PRAG. Au Costa Rica, les institutions impliquées sont le Musée National, les Musées de la Banque Centrale (MBBCR) et l’Aire de Conservation Guanacaste (ACG).
Les thématiques de recherche abordées par le PRAG se concentrent sur trois problématiques principales :
- La cordillère de Guanacaste a-t-elle été une voie de diffusion des influences culturelles qui se sont succédé au cours du temps ou, au contraire, son relief a-t-il participé à la naissance de cultures locales indépendantes ?
- Des traditions rupestres différentes existent elles dans la cordillère de Guanacaste et pourrait-on les rapprocher de groupes culturels identifiables et éventuellement d’une chronologie particulière ?
- Quelles ont été les fonctions et le rôle du Pedregal, le principal site de la cordillère, pour les différents groupes culturels qui y ont produit de l’art rupestre ?
En s’appuyant sur l’historiographie de l’art rupestre, l’étude iconographique, les recherches archéologiques, les sources ethnohistoriques et les cartes linguistiques qui ont été établies pour la région, une première définition des traditions rupestres dans la cordillère de Guanacaste pourra être mise en place. Au sein de cette cordillère, le Pedregal a dû jouer un rôle prépondérant si l’on en croit son caractère exceptionnel et singulier. Les investigations, résolument tournées vers les méthodes de recherche actuelles, se proposent d’approfondir nos connaissances de ce gisement majeur. Grâce à un drone, un levé photogrammétrique du secteur central du site a été réalisé malgré des conditions climatiques difficiles ; il a permis d’établir un Modèle Numérique de Terrain, au sein duquel, la topographie et la géomorphologie vont pouvoir être mises en relation avec l’iconographie des roches gravées. Des relevés photographiques minutieux ont déjà permis d’établir plus d’une trentaine de modèle en trois dimensions des manifestations rupestres et de leur support. Des études géomorphologiques et palynologiques mise en place avec des spécialistes de l’INRAP auront pour but de reconstituer les étapes de la formation du paysage mais aussi de la flore ancienne qui couvrait les pentes du volcan Orosi où se situe le Pedregal.
La cordillère de Guanacaste et le gisement « El Pedregal »
La cordillère de Guanacaste se compose principalement du nord au sud par les volcans Orosi, Cacao, Rincon de la Vieja, Santa maria, Miravalles et Tenorio. Le cadre d’étude comprend le versant Pacifique de cette chaine volcanique et couvre 75 km de long N-S pour une largeur de 20 km, jusqu’à la plaine côtière. Une forte densité de gisements rupestres couvre la région, avec plus d’une soixantaine de sites enregistrés dans la base de données Origenes du Musée National. On y trouve également de nombreux gisements funéraires et des sites d’habitat. Les premiers complexes céramiques mis en évidence remontent à la période Orosi (12000 à 500 av. J.-C.) et la cordillère de Tilaran au sud a révélé quelques pointes de projectiles de type Folsom (sans contexte). À priori, l’art rupestre dans la zone, composé majoritairement de rochers gravés, n’est pourtant pas si ancien. Le Pedregal se compose d’une savane de 88 hectares couverte par des chaos rocheux issus de dépôts volcaniques, entre 400 et 600 m d’altitude, sur le flanc ouest du volcan Orosi. Certains motifs du Pedregal montrent une iconographie présentant des similitudes avec la céramique de la période Tempisque (500 av. J.-C. à 300 apr. J.-C.). A priori, la production rupestre semble s’être maintenue pendant les périodes Sapoa et Ometepe (de 800 à 1550 apr. J.-C.). Le site présenterait donc presque deux millénaires d’activité rupestre. Afin de préciser cette chronologie basée uniquement sur l’iconographie et de contextualiser les phases de production, des sondages archéologiques seront ouverts dès 2019 au cœur de la savane principale mais également au pied d’un abri sous roche décoré enregistré pour la première fois en 2018 à 2 km au sud-est du Pedregal. Une seconde savane au nord accueille également des rochers gravés. Les images satellites ont permis d’y observer des espaces rectilignes quadrangulaires sans roche (piégeage sédimentaire, épierrement anthropique ?) dont le plus grand mesure 90 m par 50 m. Des sondages sont également prévus dans cette zone. La mise en place de mesures de conservation et la divulgation à la communauté scientifique comme au public en général font tout aussi bien parti des objectifs du projet. Dans ce cadre, la coopération avec les musées publics et privés du Costa Rica prend toute son importance.
Publications
Costa, P., Molina Muñoz, P., Künne, M. et Gelliot, E.
2019 Informe de la fase preliminar del Proyecto Arqueológico Guanacaste 2018. Informe entregado a la Comisión Arqueológica Nacional, San José.
Künne, Martin
2008 Arte Rupestre de Costa Rica. In Arte Rupestre de México Oriental y América Central (pp. 217–239). Berlín, Alemania: Instituto Ibero Americano, Fundación Patrimonio Cultural Prusiano y el Gebr. Mann Verlag.
Hardy, Ellen T. y Ricardo Vásquez L.
1993 Proyecto Arqueológico Volcán Orosí. Results of preliminary investigation of sitio Pedregal. Área de Conservación, Guanacaste, Costa Rica. Ms. Inédito. Museo Nacional de Costa Rica, San José.
Responsables
Philippe Costa
(Université de Paris 1, UMR 8096 et CEMCA),
Priscilla Molina Muñoz
(Museos del Banco Central de Costa Rica),
Martin Künne
(Université de Bonn et Sociedad de Investigación del Arte Rupestre de Bolivia)
Eric Gelliot
(INRAP, Université de Paris 1, UMR 8096 et CEMCA).
Collaborateurs
Virginia Vargas
(Museos del Banco Central de Costa Rica)
Francisco Corrales
(Museo Nacional)
Roger Blanco (ACG)
Muriel Boulen
(INRAP, UMR 7209)
Anaïs Champougny
(INRAP, UMR 7362 LIVE, UMR 7360)
Gérard Vernet
(INRAP, GEOLAB/UMR 6042 CNRS-UCA/UL-MSH)
Doctorant impliqué dans le projet
Eric Gelliot (UMR 8096)
Institutions partenaires
ArchAm (UMR 8096)
Museos del Banco Central de Costa Rica
Museo Nacional de Costa Rica
Université de Bonn
Centre d’Etudes Mexicaines et Centraméricaines
Institut National de Recherches Archéologiques Préventives
Financements
Institut français d’Amérique Central
Ministère des Affaires étrangères et du développement international
UMR 8096 Archéologie des Amériques
Fondation Deutsche Altamerika Stiftung
Museos del Banco Central de Costa Rica
Àrea de Conservación Guanacaste